Élysa Lachapelle
Le paysage montréalais est parsemé d’œuvres d’art public que la plupart d’entre nous ne remarquent probablement plus, tant elles sont intégrées à notre environnement. Qu’il s’agisse de monuments commémoratifs, de sculptures monumentales, de murales ou d’éléments d’aménagements paysagers, ces œuvres d’art enrichissent considérablement notre paysage urbain. Parce que ces œuvres sont d’une importance primordiale pour la Ville de Montréal, une instance leur est exclusivement dédiée : le Bureau d’art public de Montréal. Avant sa création, la collection d’art public de la ville était sous la responsabilité du Service des travaux publics et des immeubles qui ne faisait qu’entretenir très sommairement les œuvres. Ce n’est qu’en 1989, lorsque Montréal adopte le Plan d’action en art public, qu’est créé le Bureau d’art public dont le mandat est de réunir trois principales activités : l’acquisition, la conservation et la promotion.
La collection
La collection d’art public de la Ville de Montréal contient environ 300 œuvres dont 25% sont intégrées à l’architecture et 75% aux lieux publics extérieurs. La collection n’inclut que les œuvres situées sur le territoire de la Ville de Montréal et de ses 19 arrondissements, excluant celles du Métro de Montréal. La plus ancienne pièce de la collection est la Colonne Nelson, à la place Jacques-Cartier du Vieux-Montréal, qui date de 1809. De 1890 à 1930, une vingtaine de sculptures, essentiellement des monuments commémoratifs à l’effigie de personnages historiques, s’ajoutent au territoire montréalais. Ensuite, il faut attendre aux années 1960, moment de la Révolution tranquille, avant que la collection augmente de façon significative. Ainsi, le premier symposium de sculpture en 1964 et l’Exposition universelle de 1967 ont permis à Montréal une ouverture internationale, en faisant connaître nos artistes au reste du monde et en acquérant des œuvres d’artistes étrangers. C’est d’ailleurs durant l’Expo 67 que L’Homme de Calder, la pièce la plus importante de la collection, a été acquise. Il s’agit du seul stabile (mobile ancré au sol) de l’artiste non peint et l’un des plus grands qu’il ait produit. De 1980 à 1989, avec l’arrivée de la loi du 1% (1981) et grâce au symposium de sculpture Carrefour de l’industrie à Lachine, tenu en 1985, 1986 et 1988, la collection s’est enrichie d’une soixantaine d’œuvres, dont environ 50 sculptures le long du canal Lachine et du Lac Saint-Louisi.
Les trois objectifs du Bureau d’art public : acquisition, conservation et diffusion.
Le Bureau d’art public souhaite atteindre un équilibre dans sa collection, entre les œuvres nationales et internationales, tout en ayant des œuvres représentatives des différents courants et époques de l’histoire des arts visuelsii. Par souci d’équité, l’acquisition se fait par le biais de concours s’adressant uniquement aux artistes professionnels. Un jury de sept personnes, changeant d’un projet à l’autre, détermine quelle proposition sera réalisée spécifiquement en fonction de l’endroit où elle sera intégrée. Des exceptions sont possibles dans le cas d’œuvres provenant d’artistes étrangers ou lors de donations par succession.
Le programme de conservation, qui constitue le deuxième axe principal du Bureau d’art public de Montréal, consiste à préserver l’intégrité des œuvres de la collection afin d’en assurer la postérité pour les générations présentes et à venir. Pour le Bureau d’art public, « […] maintenir l’intégrité d’une œuvre signifie protéger sa matérialité, mais aussi son sens. »iii Depuis ses débuts, le Bureau compte sur plusieurs collaborateurs tels que le Centre de conservation du Québec, l’Institut canadien de conservation, les institutions muséales, ainsi que des conservateurs d’art, des historiens et des scientifiques, pour l’aider dans cette tâche. Il y a également six cols bleus, formés en 1989 et encore en poste aujourd’hui, qui ont reçu une formation du Centre de conservation du Québec sur l’entretien et la restauration du bronze et de la pierre.
Le volet diffusion du Bureau d’art public cible la population montréalaise ainsi que les touristes. Tout en voulant démocratiser l’art en embellissant la ville, Montréal se concentre beaucoup sur son caractère culturel pour attirer les touristes. La diffusion sous-entend surtout l’éducation, la promotion et la mise en valeur de la collection. Le Bureau d’art public met également l’accent sur les événements et les installations temporaires pour initier les citoyens à l’art contemporain et pour interpeller les touristes de passage à Montréal ou en inciter d’autres à y venir. La ville accorde énormément d’intérêt à ce genre de projet, car ils « […] sont toujours largement médiatisés et connaissent un grand succès auprès du public. »iv Cependant, à cause de son budget restreint, le Bureau d’art public ne peut développer à lui seul ce genre de projet. Il invite donc différents organismes artistiques et autres à en prendre l’initiative.
Malgré ses efforts remarquables pour enrichir, conserver et diffuser sa collection, le Bureau d’art public a certainement un travail considérable à accomplir pour les années à venir. En effet, la Ville de Montréal est quelque peu en retard sur d’autres grandes villes canadiennes comme Toronto et Vancouver en matière culturelle. Il va sans dire que le Bureau d’art public a son rôle à jouer dans la politique de développement intitulée Montréal métropole culturellev. Pour en savoir plus, visitez le site Internetvi du Bureau d’art public sur lequel se trouve une section informative quant au mandat et à l’histoire du Bureau. Une rubrique « Actualités » nous informe des dernières acquisitions et restaurations, des concours lancés, et offre aussi un répertoire de toutes les œuvres de la collection permettant de consulter leur fiche.
iVille de Montréal, Service du développement culturel, Le rôle de la Ville de Montréal en matière d’art public, Document déposé à la Commission permanente du conseil sur les arts, la culture et le patrimoine, Montréal, 9 avril 2003, p. 4-5, [En ligne] ‹http://www2.ville.montreal.qc.ca/ocpm/pdf/PD04/3tt.pdf›, consulté le 1er mars 2010.
ii Ville de Montréal, Direction du développement culturel et des bibliothèques et Service du développement culturel, de la qualité du milieu de vie et de la diversité ethnoculturelle, Montréal, Métropole culturelle, Politique de développement culturel de la Ville de Montréal 2005-2015, Montréal, 2005, p. 59, [En ligne] ‹http://ville.montreal.qc.ca/portal/page?_pageid=1576,4115940&_dad=portal&_schema=PORTAL›, consulté le 1er mars 2010.
iii Ville de Montréal, Direction du développement culturel et des bibliothèques et Service du développement culturel, de la qualité du milieu de vie et de la diversité ethnoculturelle, op. cit., p. 5.
iv Ville de Montréal, Service du développement culturel, op. cit., p. 6.
v Ville de Montréal, Direction du développement culturel et des bibliothèques et Service du développement culturel, de la qualité du milieu de vie et de la diversité ethnoculturelle, op. cit.
vi Ville de Montréal, « L’art public à Montréal », Site Web de la Ville de Montréal, Montréal, 2010, [En ligne] ‹http://ville.montreal.qc.ca/portal/page?_pageid=678,1153891&_dad=portal&_schema=PORTAL›, consulté le 26 février 2010.