Par Catherine Lafranchise
Présentée le mois dernier à la Galerie Division, l’exposition pissing, shmoozing and looking away de Chloe Wise abordait les thèmes de la vanité, la luxure, le désir, la consommation et l’excès. Avec cette exposition, l’artiste questionnait l’attrait pour la luxure et les concepts qui la sous-tendent. Voici donc un compte-rendu de ma visite.
Reprise des formes et des motifs associés aux produits de luxe
L’exposition était déployée dans les deux premières salles de la galerie. Dans la première pièce, Wise a réalisé des moulages en uréthane de déjeuners, qu’elle a ensuite peinturés en trompe l’œil. Puis, elle a repris les codes associés aux produits de luxe pour créer des produits d’un genre nouveau tels que des sacs à mains, des menottes et des fouets. De cette façon, son œuvre PB & J LV reprend les codes de représentation associés à la marque Louis Vuitton.
PB & J LV
Crédits : Paul Litherland, courtoisie de l’artiste et de la Galerie Division
En effet, l’artiste réutilise les nuances de couleur habituelles du célèbre monogramme de la marque et dispose des tranches de pain beurrées de façon à créer un losange, rappelant ainsi les fameux sacs à mains de la marque. De plus, elle y ajoute des ganses de cuir embossées du logo pour capter immédiatement l’attention du visiteur, puisque cet élément permet d’associer rapidement la marque à un type de produit précis, dans ce cas un sac à main. Avec ses réappropriations de produits de luxe, l’artiste se sert de l’attrait visuel de ces pièces pour créer un sentiment de désir chez le visiteur. Étant donné que le logo est un élément central du produit, ce dernier devient presque un gage de qualité pour l’œuvre de Wise.
Ain’t No Challah Back (Pack) Girl
Crédits : Paul Litherland, courtoisie de l’artiste et de la Galerie Division
Par ailleurs, on remarque que l’artiste utilise presque toujours des éléments du déjeuner pour narguer les produits de luxe, comme si le déjeuner était associé à la luxure et à la consommation excessive, ce qui n’est pas tout à fait faux à mon avis.
La signature en guise de gage de qualité
Vues d’exposition
Crédits : Paul Litherland, courtoisie de l’artiste et de la Galerie Division
Dans la deuxième pièce de la galerie, Wise présentait une installation composée de plusieurs de ses œuvres. L’artiste y questionne la notoriété associée aux marques et l’importance que celles-ci ont dans notre société moderne. Ainsi, la pièce donnait sur deux balançoires fabriquées dans les mêmes matériaux que les sacs à main de luxe des marques Chanel (The Swing (Chanel)) et Dior (The Swing (Dior)) ornées bien évidemment de leurs écussons emblématiques respectifs. En écho à ces balançoires, on pouvait apercevoir derrière elles trois panneaux représentant des détails de la fameuse toile Les hasards heureux de l’escarpolette de Jean-Honoré Fragonard, signés par les doubles C entrelacés de la célèbre maison de haute couture Chanel. En apposant le logo d’une marque au bas de cette toile, on dirait que l’artiste prend position dans le vaste débat sur la valeur marchande des œuvres et à l’omniprésence de la contrefaçon dans le marché de l’art et des produits de luxe. De cette façon, est-ce l’œuvre qui attire notre regard ou bien le nom de l’artiste (dans ce cas-ci, le logo Chanel) apposé dans le bas du tableau ? Peut-être un peu des deux ? Le tableau aurait-il la même valeur s’il était mis en vente par la maison Chanel ?
Détail de l’œuvre Rococo Chanel (marble)
Crédits : Paul Litherland, courtoisie de l’artiste et de la Galerie Division
Finalement, j’ai été surprise par l’exposition de Chloe Wise et par les thèmes qu’elle aborde dans sa pratique. On ne peut s’empêcher de contempler ses œuvres, puisqu’elle y reprend des symboles forts associés à la luxure qu’elle questionne en parallèle avec la nourriture, et ce, à l’aide de plusieurs matériaux. Ainsi, cette exposition fait définitivement de Wise une artiste à surveiller dans les prochaines années.
Chloe Wise
http://www.chloewise.com/
http://www.galeriedivision.com/montreal/exhibition/chloe-wise